Habitat et vieillissement de la population dans l'Allier : état des lieux et perspectives
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Synthèse
Enjeu majeur des décennies à venir, le vieillissement de la population est un phénomène inéluctable, qui impactera nécessairement, par son ampleur, les équilibres socio-démographiques, ainsi que les modes de vie, particulièrement en matière de dépendance et d’habitat.
En 2008, avec près du quart de sa population âgée de 65 ans ou plus, l’Allier compte parmi les 10 départements français où le vieillissement est le plus marqué. À l’horizon 2025, selon les projections de l’Insee (scénario central), cette part atteindrait près de 30%, puis 33% en 2040. En réalité, cette augmentation de la population âgée devrait être disparate, avec une forte hausse des 65-79 ans sur la période 2008-2025, et dans une moindre mesure des 80 ans ou plus. Ce n’est qu’à partir de 2025, et l’arrivée au grand âge des générations du baby-boom, que les effectifs des 80 ans ou plus augmenteraient plus significativement.
Cette distinction est importante, dans la mesure où les séniors constituent une population hétérogène, avec un taux de dépendance à domicile de près de 20% pour les 80 ans ou plus, contre 2% pour les 60-79 ans. Cette survenue de la dépendance au grand âge, pose la nécessaire question du maintien à domicile, qui est un souhait commun des politiques publiques et de la population, sachant que près de 85% des 80 ans ou plus continuent de vivre dans leur logement. Au carrefour de l’habitat et du social, c’est un enjeu d’ampleur qui nécessite des réponses en matière d’adaptation du logement, d’autant que cela peut permettre de retarder la perte d’autonomie.
Avec plus de 70% de propriétaires occupants chez les 80 ans ou plus, le parc occupé en propriété est le plus concerné par cette problématique, sachant qu’il représente plus de 80% de la hausse du nombre de ménages de 80 ans ou plus, entre 1999 et 2008. Cela dit, on observe également un vieillissement prononcé sur les parcs locatifs privé et HLM, mais dans une moindre amplitude.
Cependant, le maintien à domicile reste fragilisé par des conditions de logement plus difficiles pour les séniors, que pour le reste de la population. En effet, les personnes âgées de 80 ans ou plus, vivent davantage dans des logements inconfortables et énergivores, plus particulièrement dans le parc privé. Quant au parc HLM, il est plus concerné par des problématiques d’accessibilité, notamment le parc collectif d’après-guerre.
À ce constat vient s’ajouter un isolement marqué des séniors, puisque 60% des ménages de 80 ans ou plus sont constitués d’une seule personne, le plus souvent des femmes. Dans ce contexte, le rôle des aidants familiaux est particulièrement important, dans la mesure où la proximité des enfants peut pallier en partie le manque d’adaptation du logement.
Ensuite, à la problématique du maintien à domicile, vient se greffer celle du rapport entre les coûts du logement et le niveau de vie des séniors, puisque celui-ci tend à diminuer, au moment où les retraites se substituent aux revenus d’activité, ce qui peut, dès lors, engendrer des difficultés de solvabilité faute d’anticipation de cette baisse de revenus. En outre, bien que le taux de pauvreté des séniors soit moins élevé que celui des ménages plus jeunes, il augmente plus fortement dans l’Allier entre 2006 et 2009, contrairement aux tendances régionale et nationale.
Le maintien à domicile et donc, l’adaptation du logement, font partie intégrante des politiques publiques en matière d’habitat. En effet, la plupart des bailleurs HLM mènent des opérations d’adaptation, en s’appuyant sur leurs capacités opérationnelles et leur proximité relationnelle avec les locataires les plus âgés, et ce, même si leurs modes d’interventions diffèrent.
Dans le parc privé, les différentes aides financières relatives aux travaux d’adaptation – qui concernent le plus souvent les sanitaires – sont essentiellement sollicitées par les propriétaires occupants, avec un taux d’intervention logiquement plus élevé pour les 80 ans ou plus. Cela dit, on observe que le système d’aides est peu orienté vers l’anticipation de la perte d’autonomie, ce qui conduit le plus souvent à des situations d’urgence. En outre, le lien entre les domaines de l’habitat et du social mérite d’être conforté, voire renforcé, notamment en termes d’évaluation des besoins d’adaptation et de transmission de l’information. D’ailleurs, le niveau d’intervention dans le parc occupé en propriété peut paraître peu élevé, comparé au parc HLM.
Dès lors, les séniors qui vivent dans le parc locatif privé apparaissent les plus fragilisés en termes de maintien à domicile et de politique d’adaptation, en raison d’un régime juridique et de conditions de logement, qui peuvent paraître moins favorables que dans le parc locatif HLM. D’ailleurs, les aides à l’adaptation sont très peu sollicitées dans le parc locatif privé.
Le vieillissement aura également un impact croissant sur les marchés, mais modéré à moyen terme, puisque le taux de mobilité reste relativement bas chez les personnes âgées. En effet, même si en 2008, les 65 ans ou plus représentent 11% des emménagés récents, cette part ne devrait pas dépasser 15% en 2025, malgré une hausse mécanique de la demande liée au vieillissement. Ainsi, localement, les politiques en matière d’habitat devront tenir compte de ces volumes modérés, au moins à moyen terme. Par ailleurs, le vieillissement aura également un impact sur les ventes de logement, ce qui pourrait se traduire par une remise massive sur le marché d’un parc ancien, le plus souvent vétuste et abordable en termes de prix, pour au final entraîner un accroissement de la concurrence sur un marché déjà détendu.
Par ailleurs, la mobilité des séniors répond à des motifs et à des besoins spécifiques, qui peuvent être en contradiction avec ceux des plus jeunes, ce qui induit une faible concurrence intergénérationnelle. En effet, les déménagements des personnes âgées sont souvent consécutifs à l’isolement, qui suscite un besoin de sécurisation du cadre de vie et un maintien des sociabilités. Ainsi, à mesure que les ménages vieillissent, on assiste à un retour vers le secteur locatif privé, aux dépens du parc occupé en propriété, avec une demande plus forte pour des logements de plus petite taille, notamment les T3. Cela permet aux personnes âgées de s’adapter à la baisse de leurs revenus et à leurs capacités physiques, pour un entretien plus facile du logement. Parallèlement, on note un retour des séniors sur les pôles de services urbains et ruraux, même s’ils emménagent 1 fois sur 2 sur leur commune de résidence antérieure, un choix en lien avec les relations sociales qu’ils ont pu établir et auxquelles ils restent attachées.
Outre le parc de logements ordinaires, le vieillissement impacte fortement les mobilités des personnes âgées qui quittent leur domicile, pour s’orienter vers des établissements médicalisés ou des dispositifs alternatifs. Ces formes de logements ou d’hébergements dédiées aux personnes âgées recouvrent plusieurs réalités avec, d’une part, les EHPAD qui accueillent essentiellement des personnes âgées dépendantes ayant besoin d’une prise en charge médicale, et d’autre part, l’ensemble des dispositifs alternatifs réservés aux séniors faiblement dépendants. Par ailleurs, ces dispositifs, qui regroupent les EHPA, les résidences séniors et les opérations de logements ordinaires dédiées aux personnes âgées, sont sous-représentés dans l’Allier, comparés au plan national.
Enfin, si le vieillissement devrait être similaire sur le secteur urbain et sur le secteur rural, ce dernier serait le plus concerné par les difficultés liées au maintien à domicile, puisqu’il cumule une plus forte précarité chez les séniors, un parc ancien plus inconfortable et plus énergivore, un taux de dépendance plus élevé, ainsi qu’une moindre densité de services. En outre, si le secteur rural apparaît bien doté en EHPAD, il semblerait déficitaire en matière de dispositifs alternatifs, alors que sur le secteur urbain, on ne peut écarter un risque de surproduction à moyen terme.
Ce qu'il faut retenir
Une hausse du nombre de personnes âgées de 80 ans ou plus, qui s'accélérera à partir de 2025, avec l'arrivée au grand âge des générations du baby-boom, impliquant des besoins croissants en termes de prise en charge de la dépendance, notamment sur le secteur rural
Le maintien à domicile : un enjeu d'ampleur à partir des années 2020-2025, notamment dans le parc occupé en propriété, qui regroupe plus de 70% des 80 ans ou plus et qui apparaît le plus concerné par la hausse du nombre de séniors
Le maintien à domicile suppose un environnement adapté, en raison notamment de l'isolement marqué des personnes âgées
Un maintien à domicile fragilisé par des conditions de logement plus difficiles pour les séniors, qui vivent davantage dans des habitations énergivores et inconfortables que le reste de la population, notamment sur le secteur rural
La problématique de l'accessibilité apparaît la plus prégnante dans le parc locatif situé sur le secteur urbain
Un parc locatif en retrait du parc HLM, face à l'enjeu du maintien à domicile et de l'adaptation des logements
L'adaptation des logements dans le parc occupé en propriété soulève des problématiques liées à la prévention de la dépendance et à l'articulation entre les domaines de l'habitat et du social
Une précarité qui touche plus particulièrement les séniors propriétaires occupants sur le secteur rural
Le poids des séniors sur les marchés reste faible, en raison d'un taux de mobilité relativement bas, mais l'impact du vieillissement sur la demande en logements devrait s'accroître progressivement
Un retour au statut de locataire au grand âge, principalement sur les pôles de services urbains et ruraux
Une forte progression de la proportion de logements de type 3, à mesure que les ménages vieillissent
Des dispositifs alternatifs entre le maintien à domicile et l'établissement médicalisé à développer, notamment en milieu rural ?